Quel a été ton premier contact avec la mode vintage ?

Donc, pour répondre à ta première question, pour me présenter en quelques mots : je suis Émilie Jadeuban, la fondatrice de la boutique Fancy, située au 65 rue de Turenne. Ma boutique a changé de nom suite à l’ouverture de mon propre espace. Auparavant, ma sélection s’appelait Fancy Milz, et ça a évolué depuis le mois de mars.

J’ai fait ma carrière entre le monde du sport et de la culture pendant plus de dix ans avant de lancer ma sélection vintage à l’été 2022.

Qu’est-ce qui t’a poussée à ouvrir un concept store vintage ?

Ce qui m’a poussée à ouvrir un concept store vintage, je pense que c’est la suite logique de ces presque trois années d’exercice dans ce domaine.

J’organisais déjà, il y a dix ans, des événements vintage à Strasbourg, dans le cadre de mes études. C’était un projet un peu à part, mais ça montre que j’ai toujours eu cette sensibilité-là.

J’ai commencé avec un site internet, puis j’ai fait des pop-up : d’abord à Strasbourg, puis très vite à Paris. Le fait de s’installer, de se réinstaller à chaque fois, c’est beaucoup de logistique, et aussi assez fatigant. Mais c’était une expérience très enrichissante, car ça m’a permis de rencontrer beaucoup de monde dans cet univers, de coopérer avec d’autres sélections vintage. Et puis, au fur et à mesure, l’envie de pérenniser s’est imposée.

Quand on a une direction artistique assez forte, comme la mienne, avec un parti pris très années 90-2000, il devient important – et même nécessaire – d’avoir son propre espace, pour vraiment mettre en valeur sa sélection.Donc, j’ai ouvert ma boutique à Paris il y a bientôt trois mois.

Y a-t-il une époque qui t’inspire plus particulièrement ? Si oui, pourquoi ?

Il y a deux époques qui m’inspirent particulièrement : les années 90 et les années 2000.

Les années 90, pour leur côté sophistiqué, et les années 2000, pour ce côté girly et sexy.

Je trouve que le mélange des deux peut vraiment apporter quelque chose d’intéressant, avec des pièces fortes mais aussi des basiques qui permettent de composer des tenues pour tous les jours.

Qu’est-ce qui guide tes choix quand tu sélectionnes les pièces de ta boutique ?

Pour qu’un vêtement entre dans ma collection, il faut d’abord qu’il soit beau, et qu’il corresponde à mon ADN. Je vois souvent de très beaux vêtements, mais qui ne correspondent pas du tout à mon univers, donc ceux-là, je les laisse à d’autres.

Je privilégie aussi les vêtements fabriqués en France ou en Italie : c’est un critère important pour moi. Ensuite, j’accorde beaucoup d’attention aux matières. Je privilégie les matières nobles, mais je ne suis pas fermée à certains synthétiques non plus.

Il ne faut pas diaboliser certaines matières comme le polyester ou la viscose. Il y a du bon et du moins bon, comme partout. L’idée, de toute façon, c’est de donner une seconde — voire une troisième — vie à des vêtements qui ont déjà été portés, qui ont déjà duré dans le temps.

Est-ce que porter ou vendre du vintage est, pour toi, une manière de s’opposer à certaines dérives

Porter et vendre du vintage, c’est pour moi une manière de m’imposer, ou plutôt de m’opposer consciemment aux dérives de la mode actuelle. Cela dit, il faut aussi faire attention, car il y a une forme de surconsommation dans le vintage.

Aujourd’hui, je n’achète quasiment que de la seconde main — je dis bien quasiment. Il m’arrive parfois d’acheter un petit top basique ou quelques pièces neuves. Je pense qu’il ne faut pas être trop strict ou fermé à ce sujet.

Mais oui, je trouve que c’est bien que de plus en plus de monde se mette à la seconde main, à vendre ou à consommer autrement. J’espère qu’à l’avenir il y aura moins de vêtements neufs sur le marché, car c’est une aberration écologique. Quand on voit que certaines marques en Chine peuvent récolter de l’argent en donnant leurs invendus aux associations, ça devient choquant. Personne n’a envie d’acheter de la fast fashion en seconde main, ou du moins de l’ultra fastfashion.

Comment imagines-tu ta boutique évoluer dans les années à venir ?

C’est une très bonne question.

Ma boutique vient à peine d’ouvrir, donc pour l’instant, j’essaie déjà de me projeter sur les prochains mois pour voir quel mode de fonctionnement je vais pouvoir mettre en place. Mais j’espère que d’ici quelques années, ma boutique aura une vraie notoriété, que je serai reconnue pour le style que je propose, et que j’aurai fait de belles collaborations.

J’aimerais peut-être ouvrir un espace un peu plus grand, mais qui me ressemble autant que celui-ci. Et mon objectif serait que la seconde main, avec le style que je propose, se développe un peu plus dans des villes autres que Paris, notamment Strasbourg, où j’aimerais pouvoir continuer ma vie dans quelques années.

Mais pour l’instant, Strasbourg n’est pas encore prêt.